Modèles d’IA générative : comment choisir ?

À mesure que les entreprises intègrent l’intelligence artificielle générative dans leurs produits et processus, un choix stratégique s’impose : s’appuyer sur un modèle fermé, comme ChatGPT d’OpenAI, ou sur un modèle ouvert, tel que ceux proposés par Mistral AI, Meta (LLaMA), ou d'autres initiatives open source. Ce choix va bien au-delà d’une simple préférence technique : il touche à la souveraineté des données, à la maîtrise des coûts, à l’innovation et au positionnement concurrentiel.

Contrôle, souveraineté et personnalisation : les atouts des modèles ouverts

Les modèles open source permettent aux entreprises de déployer l’IA en local ou sur leurs propres infrastructures cloud. Cela garantit une maîtrise complète des données, un facteur critique pour les secteurs régulés (finance, santé, défense) ou pour toute entreprise soucieuse de sa souveraineté numérique. De plus, l’accès libre aux poids du modèle permet une personnalisation poussée, facilitant l’adaptation à des cas d’usage spécifiques ou à des contextes métiers précis.

Cette capacité à affiner un modèle selon ses besoins internes donne un net avantage concurrentiel aux entreprises disposant d’équipes techniques compétentes. En revanche, cela implique un investissement initial en ingénierie, ainsi que la mise en place d’une infrastructure de déploiement et de surveillance.

Fiabilité, sécurité et support : l’argument des modèles fermés

Les modèles fermés comme ChatGPT sont proposés sous forme de services (API, interfaces SaaS), clé en main et immédiatement opérationnels. Pour de nombreuses entreprises, cela permet un time-to-market très rapide, avec un niveau de fiabilité élevé, des mécanismes de filtrage robustes, et un support technique professionnel. Ces modèles bénéficient d’un entraînement massif, souvent couplé à des techniques de RLHF (renforcement par feedback humain), garantissant une stabilité conversationnelle et une meilleure gestion des réponses sensibles.

Ce modèle "as-a-service" est particulièrement adapté aux entreprises qui cherchent à intégrer rapidement l’IA dans leurs opérations sans développer d’expertise interne poussée. Il présente toutefois deux inconvénients majeurs : une dépendance vis-à-vis du fournisseur (vendor lock-in) et une exposition plus grande à des risques de confidentialité, notamment si les données traitées sont sensibles.

Coûts et scalabilité : une approche différenciée selon les cas d’usage

Côté coûts, les modèles ouverts sont attrayants à moyen-long terme. Une fois déployés, ils permettent de s’affranchir des frais d’API ou de licence à l’usage, qui peuvent devenir prohibitifs à grande échelle. Cela est particulièrement intéressant pour les entreprises qui prévoient un volume élevé de requêtes (par exemple, dans des assistants internes ou des chatbots clients intensifs). Les coûts initiaux d’intégration sont plus élevés, mais ils peuvent être amortis rapidement si le volume ou la durée d’usage le justifient.

Les modèles fermés, quant à eux, offrent une tarification plus simple et une scalabilité immédiate. Ils sont idéaux pour tester un produit ou valider un business model rapidement. En revanche, à mesure que l’adoption croît, les coûts opérationnels peuvent dépasser ceux d’un modèle open source auto-hébergé.

Innovation et agilité : un équilibre à trouver

Les modèles ouverts favorisent l’innovation. Grâce à une large communauté de développeurs, à la liberté de modification et à la rapidité d’évolution des versions, ils permettent une agilité technique difficile à atteindre avec des modèles fermés. De nombreuses startups technologiques utilisent des modèles comme Mistral ou Mixtral pour construire des produits différenciants sans contrainte d’API.

Les modèles fermés, de leur côté, proposent des mises à jour régulières, des versions de plus en plus performantes et des fonctionnalités intégrées (mémoire, vision, agents…). Pour les entreprises cherchant à se concentrer sur le produit final plutôt que sur la technologie sous-jacente, cela peut représenter une meilleure allocation des ressources.

Risque réglementaire et gouvernance

Du point de vue de la conformité, les modèles fermés apportent une certaine sérénité : le fournisseur prend en charge les problématiques de sécurité, de protection des données, de filtrage des contenus illicites, etc. Cela peut faciliter la gestion du risque juridique, en particulier dans les secteurs fortement régulés.

En revanche, les modèles ouverts impliquent une responsabilité directe de l’entreprise dans la gouvernance du modèle. Cela peut être vu comme une contrainte, mais aussi comme un avantage en termes de contrôle et de transparence, notamment dans une logique de conformité RGPD.

Au total, le choix entre modèle fermé et modèle ouvert n’est pas binaire, ni définitif. Il dépend du niveau de maturité technologique de l’entreprise, de ses priorités court terme (rapidité, coûts, conformité) et de sa vision long terme (souveraineté, innovation, différenciation). Certaines entreprises n’hésitent plus à hybrider les deux approches : test sur modèle fermé, déploiement sur modèle ouvert ; ou encore utilisation d’un modèle ouvert affiné et sécurisé à des fins internes, tout en utilisant un modèle fermé pour les interactions externes.

Dans tous les cas, l’enjeu est clair : faire de l’IA générative non pas une simple couche d’automatisation, mais un levier stratégique de performance et d’innovation.

 

Michel Ktitareff

CEO & CO-FOUNDER SCALE- UP BOOSTER